Les Forbin, fastes et grandeur d'une famille provençale
Un blason, "D’or à un chevron d’azur, accompagné de trois têtes de léopard de sable, arrachées, lampassées & armées de gueules, posées 2 en chef & 1 en pointe" Une devise, Regem ego comitem, me comes regem (Tu m’as fait Comte, je te fais Roi) |
Françoise de Forbin des Issarts assistait ce jeudi 16 juin 2016 à une conférence érudite qu'Alexandre Mahue -dont sa modestie nous empêche de décrire ses nombreux titres universitaires-, consacrait à sa famille et aux traces matérielles qu'elle a laissées aux XVIIème et XVIIIème siècles dans notre Provence. Soixante-dix personnes ont été subjuguées par la verve de notre conférencier !
La famille de Forbin est méconnue, mis à part certains de ses membres, comme Palamède le Grand, diplomate brillant à qui nous devons l'union de la Provence au Royaume de France. C'est une famille "qui tient le haut du pavé", sûre de son rang et qui, comme toutes les familles de l'aristocratie provençale, est sujette au clientélisme.
La famille rejette une supposée descendance écossaise d'un John Forbes. Les diverses branches descendent de Guillaume de Forbin, maître peaussier originaire de Langres, installé à Marseille. C'est, au départ, une dynastie de marchands et armateurs puissants. Cette puissance se traduit par des acquisitions ou constructions de demeures qui vont marquer le paysage provençal. D'autre part, des règles de succession strictes vont permettre de garder ces biens dans la famille, même à l'extinction d'une branche.
Alexandre Mahue présente alors les diverses constructions propres à chaque branche.
Tout d'abord, la branche de Sollies qui dispose d'une demeure "La Galerie" au XVIème siècle. C'est une bastide entourée d'une exploitation agricole (figues) source de revenus importants pour la famille (avec les salins d'Hyères). Largement remaniée au XIXe siècle, la bastide disparait sous un coffrage de brique de près d'1,5 m d'épaisseur ! A l'extinction de la branche, elle passe aux Forbin La Barben.
La branche de Gardannehabite une bastide entre Marseille et Aubagne, le château de St Marcel, qui sera transformée au XIXème siècle par les Forbin d'Oppède. La construction conserve un intéressant portail commandé par le grand marin Claude de Forbin. Elle se caractérise aussi par le réemploi de baies renaissance de la maison primitive des Forbin. Le domaine s'enrichit d'un jardin particulièrement luxuriant et où essences exotiques et curiosités s'entremêlent.
La branche de La Barben a une grosse aisance financière et mène une politique de commande architecturale importante. De gros travaux sur le château primitif sont menés dès 1630. La chapelle est construite au XVIIème siècle. Les créneaux du château, lieu de vie, ne sont apparus qu'au XVIIIème siècle ! Le château comprend un ensemble de boudoirs exceptionnels dans ses tours, décorés de papier peint Reveillon, avec un mobilier Directoire d'origine. Il y a même un boudoir pour homme ! Le boudoir Salon perspective comporte des peintures à l'huile représentant des châteaux d'Ile de France imaginaires, inspirés des gravures de Pérelle.
Château de la Barben (Marc Brocard)
La branche de la Barben occupe à Aix l'hôtel de Ribbe situé dans le quartier Mazarin. Il présente la particularité d'avoir un escalier monumental qui occupe pratiquement le tiers de la construction.
La branche de Janson possède, à Mane, une seigneurie achetée en 1598. Le château, qu'ils fortifient, possède sept appartements. La famille crée un couvent de Minimes, qui lui servira aussi de nécropole. A Raphèle lès Arles, le château "La Jansonne" est construit en 1718 par Jacques de Forbin Janson, archevêque d'Arles : il présente une forte symétrie, des fenêtres "feintes", une belle chapelle, un beau jardin et, concession à la Provence, un lanternon.
La Jansonne
Château de Sauvan
A Sauvan (04), -voir ci-dessus- c'est un "petit Trianon" dont la construction est inachevée, qui reprend les traits de la Jansonne et surtout prévoit un jardin magnifique. Pourquoi un arrêt des travaux pour une famille dont les revenus sont confortables ??? Le château de Villelaure (84) ne possède ni décor ni sculpture et reste dans un état déplorable…
La branche de La Roque d'Anthéron y construit un château austère avec un extraordinaire escalier à décor de gypserie, qui n'est, hélas, pas protégé.
La branche d'Oppède est riche. Elle occupera, à La Fare, un château qui possède un ensemble monumental d'escaliers extérieurs, avec trois statues et quelques mascarons grotesques. A Peyrolles, le château des Forbin est actuellement l'hôtel de Ville et a bénéficié au XVIIe siècle d'un projet exceptionnel qui offrait la collaboration de grands maîtres parisiens. Le plus grand château de Provence est à La Verdière (83), bâtisse médiévale récupérée au XVIIème siècle. 194 fenêtres sur une façade austère, néo-féodale, mais à l'intérieur, une débauche de gypseries font l'intérêt de ce palais d'été…
Ce dernier château pourra être découvert le 22 septembre par ceux qui se seront inscrits auprès de l'association et qui auront alors toutes les explications détaillées d'Alexandre Mahue !